Nous ne prétendons pas avoir toutes les réponses mais proposons des solutions et apportons des questions en lien direct avec les femmes et leurs familles. Porte-parole de 20 000 femmes québécoises, nous prenons, à ce titre, lors des consultations de la commission Clair, le parti des femmes et, plus particulièrement, celui des aidantes dites «naturelles». Ne l’oublions pas, ces aidantes, ce sont nous-mêmes, nos mères, nos sœurs, nos filles et quelquefois nos fils et nos frères, nos voisines et nos amies.
Avec le virage ambulatoire, le constat est lourd pour les femmes, qu’elles soient utilisatrices ou travailleuses des services de santé et des services sociaux, et plus encore lorsqu’elles sont aidantes car le travail effectué n’est ni reconnu, ni supporté. En effet, ces aidantes n’ont pas d’instances où réellement faire valoir leurs besoins et pourtant le travail, invisible et non rémunéré, qu’elles effectuent, profite à tous et chacun mais aussi à l’État. La recherche faite auprès de groupes de femmes aidantes, Qui donnera les soins ? Les incidences du virage ambulatoire et des mesures d’économie sociales sur les femmes du Québec (1998), montre, pour les aidantes, une absence d’information et de support, des soins plus nombreux et complexes, des coûts supplémentaires et des impacts sur leur vie et leur santé, pour les travailleuses, des milieux de travail détruits, des qualifications non reconnues, une santé éprouvée. Une deuxième recherche en cours dévoile que 20 à 40% des aidantes se retrouvent en situation de détresse, d’épuisement et de burn-out : des aidantes malades du transfert de responsabilités sur leur dos !
Le travail invisible, non rémunéré, des femmes dont il est question ici, comprend les tâches et responsabilités auprès des familles. Aujourd’hui, environ 76% des mères de 25 à 44 ans sont sur le marché du travail ; leur revenu, indispensable à leur autonomie, est essentiel à la survie de leur famille. Pourtant dans 52% des couples où les deux parents travaillent, les femmes assument encore la charge complète des travaux ménagers. Seulement 10% des conjoints prennent en charge en tout ou en partie ces tâches.
Par ailleurs, nous constatons un double discours social. D’une part, les femmes doivent être sur le marché du travail mais aussi auprès des proches ayant besoin d’aide. L’État et ses institutions nous donnent l’impression de revenir à la famille traditionnelle d’avant les années 60, ou de ne l’avoir jamais quittée. Le réseau a parlé de virage avec un support aux familles via les CLSC et les services de première ligne mais, dans la réalité, il transfère le travail dans le panier des aidantes et aidants, généralement celui des femmes. Avons-nous fait le saut vers une société où les femmes et les hommes peuvent être égaux ou restons-nous dans une société où ils peuvent seulement prétendre à l’égalité ?
Par conséquent, nous demandons à la ministre de la Santé et des Services sociaux de donner priorité à la clientèle et à leur famille plutôt qu’au béton ou aux machines, aussi utiles soient-elles. Nous demandons d’axer les services de santé et les services sociaux sur la prévention, en lien avec l’objectif de la réforme : la citoyenne et le citoyen au cœur de décisions.